Dans le laboratoire de Pasteur

Visitable jusqu’au 19 août 2018 au Palais de la Découverte de Paris, l’exposition « Pasteur, l’expérimentateur » rend hommage à l’ingéniosité scientifique de ce grand savant du passé, considéré un des pères de la science moderne.

Louis Pasteur le chimiste, le chercheur, l’inventeur, l’expérimentateur, qui vécut de 1822 à 1895, est sûrement une figure bien connue dans le monde entier, et spécialement des français ; mais ses champs d’investigation ont été tellement vastes qu’une exposition pour présenter ses nombreux et importants travaux était nécessaire et donc la bienvenue.

L’exposition

Pasteur était un grand penseur, mais c’est sans doute sa propension pour les applications pratiques de ses idées qui l’a fait tant avancer dans ses recherches. Il a beaucoup voyagé : avec ses collaborateurs il se déplaçait sur le terrain, appelé à résoudre des problèmes par des industriels, des agriculteurs ou des cultivateurs. Auprès d’eux, il improvisait des laboratoires.
C’est le côté pratique de ses recherche qui est mis en avant dans l’exposition. Dans plusieurs sections on retrouve la reproduction de ses instruments et de ses dispositifs expérimentaux.
Cette charmante exposition nous plonge dans l’ambiance du XIXe siècle, époque de grands changements, fertile en inventions et découvertes majeures : mise en place de l’éclairage public à gaz (1829), découverte de Neptune (1846), publication de l’Origine des espèces de Charles Darwin (1859), premières automobiles à essence (1886)… pour n’en citer que quelques unes.
Pour mieux nous immerger dans le siècle de Pasteur, les commissaires de l’exposition ont choisi de nous faire également connaître des mises en scène esthétiques et des divertissements de l’époque : ombres chinoises, panoramas circulaires, théâtre optique et jouets optiques comme le praxinoscope.

Praxinoscope vu à l’expo

De plus, ils ont conçu l’exposition comme s’il s’agissait d’une pièce de théâtre. Il y a un prologue, six actes et un épilogue. Parce que la vie de Pasteur a traversé différentes phases et périodes, et parce que lui aussi aimait exposer ses découvertes de façon théâtrale.

Prologue

C’est dans cette première partie de l’exposition que le visiteur prend connaissance du contexte historique dans lequel a vécu Pasteur et découvre quelques éléments de sa biographie.

La voix de Marie, sa femme, raconte de la naissance de Louis dans la région du Jura, des son travail acharné, de ses premiers problèmes de santé, de la mort de trois de leurs cinq enfants. Cette voix accompagne une projection d’images sur un buste de Pasteur, faite avec la technique du mapping vidéo.

Acte 1

Le premier important travail de Pasteur s’achève juste à la fin de ses études, quand il a seulement 26 ans. En fait, à l’époque, on n’arrive pas à s’expliquer pourquoi l’acide tartrique (un acide présent dans le vin) et l’acide paratartrique (produit par erreur lors de la production de vin) ont une composition chimique identique mais se comportent différemment face à la lumière. Pour mieux étudier ces deux substances, Pasteur a l’idée de les faire cristalliser et découvre ainsi, après des longues observations au microscope, que les deux cristaux obtenus sont symétriques l’un de l’autre mais pas superposables, comme notre main droite et notre main gauche. Pasteur imagine que la structure interne de ces substances, donc la disposition de leurs atomes, doit refléter la structure de leur cristal. De cette manière, Pasteur vient de découvrir le phénomène de la chiralité : certaines molécules existent en 2 formes géométriques différentes, même si leur formule brute est la même.

Cette découverte a été très importante pour comprendre par exemple, comment un composé chimique peut être, selon sa forme, un médicament efficace ou un poison violent. Dans cette section de l’expo on peut s’amuser à reconnaître les deux formes des cristaux grâce à des maquettes ou faire des expériences d’optique.

Acte 2

Au XIXe siècle on était au courant de l’existence des micro-organismes, mais on n’imaginait pas qu’il puissent avoir des effets macroscopiques jusqu’à arriver à affecter la santé des cultures, des animaux ou de l’homme. On ne savait pas non plus par quel mécanisme le jus de raisin se transforme en vin, le vin en vinaigre et l’orge en bière, ni comment le pain lève et le lait tourne. Pasteur se penche sur ces sujets et trouve confirmation dans le fait que les « germes » sont à l’origine de tous ces phénomènes. Pour ce qui concerne les productions alimentaires issues de fermentations, il arrive à identifier les micro-organismes responsables de chaque type de fermentation (lactique, alcoolique, acétiques, etc.). En outre il identifie aussi les microbes responsables des maladies qui détériorent le vin, le lait etc.

Micro-organismes responsables des fermentations alimentaires (dispositif tactile)

Mais il ne s’arrête pas à l’observation et à l’identification… il trouve également des solutions ! Le procédé de chauffage des vins par exemple, appelé pasteurisation par la suite, le rend populaire auprès des industriels et de l’empereur Napoléon III.
Sous le chapiteau de l’Acte 2 on peut se glisser dans la peau des premiers microbiologistes et chercher à dessiner des bactéries vues dans un faux microscope, à l’aide d’un dispositif optique appelé chambre claire.

Acte 3

Pasteur est aussi connu pour son obstination et pour avoir participé activement à plusieurs controverses scientifiques de l’époque. La plus féroce a été, probablement, celle qui opposait les partisans de la théorie de la génération spontanée à ceux qui pensaient, comme Pasteur, que les micro-organismes (et toutes les autres formes de vie) ne peuvent pas s’auto-générer. Une âpre et longue querelle s’installe entre Pasteur et le médecin Félix Pouchet. Ce dernier soutient que dans l’air il y a une force vitale capable de faire naître des germes dans une solution, par exemple une décoction de foin.

Pasteur démontre que si on empêche aux microbes présents dans l’air, mais pas à l’air lui-même, d’atteindre la solution, aucun être vivant s’y développe. Pour cette démonstration le savant met à point un ballon à col de cygne, qui fait passer l’air mais qui bloque les micro-organismes. Pasteur a fini pour convaincre tout le monde avec une démonstration à la Sorbonne à la quelle assistent aussi George Sand et Alexandre Dumas père !
Pour reparcourir toute l’histoire de la diatribe et de l’invention du ballon col de cygne, différents multimédia très originaux, comme une vitrine magique, sont à disposition des visiteurs.

Vitrine « magique »
Acte 4

Pasteur ignore tout du cycle de vie du ver à soie quand il est appelé pour résoudre la crise qui frappe l’élevage de ces insectes. La chenille produit le précieux fil qui fait tourner l’économie du Sud de la France, mais une catastrophe en cours, sûrement provoquée par une maladie, plonge les éleveurs dans la misère. Pasteur se rend sur les lieux et commence à broyer les insectes pour les observer au microscope. De cette façon il arrive à voir les agents infectieux qui provoquent deux maladies : la pébrine et la flacherie. Toujours au microscope, il trie les œufs sains et les œufs malades, ensuite détruit ces derniers et sauve, ainsi, la filière de la soie. Dans cette partie de l’exposition se trouvent des maquettes tactiles sur le cycle de vie du ver à soie (œufs, chenille, cocon, chrysalide…), conçues pour les non-voyants mais appréciées par tout le monde.

Ver à soie
Acte 5
Épidémie de choléra dans une image de l’époque

Au XIXe siècle les maladies infectieuses sont un fléau : rage, tuberculose, peste, syphilis, tétanos etc. sont les premières causes de mort. La famille de Pasteur est aussi durement touchée : une des sœurs de Pasteur meurt de tuberculose et deux de ses filles de fièvre typhoïde.
Sans connaître les causes de ces terribles maladies, il est pratiquement impossible de les éradiquer.
Pasteur et son jeune concurrent allemand Robert Koch prouvent que les maladies infectieuses sont causées et transmises par des agents infectieux, des microbes invisibles venant de l’extérieur du corps. Cela donne une première piste pour diminuer les infections : l’hygiène et l’antisepsie rentrent dans les hôpitaux. Les médecins commencent, peu à peu, à se laver les mains et à désinfecter les instruments chirurgicaux, et le nombre de décès chute.

Mais Pasteur rêve de pouvoir faire mieux : développer auprès des patients une immunité contre les attaques microbiennes. Inspiré par les travaux du pionnier de la vaccination, Edward Jenner, il commence à expérimenter sur les animaux, d’abord les poules, puis les moutons enfin les lapins et les chiens enragés. L’atténuation des microbes, le principe du vaccin, fonctionne ! Et quand le jeune Joseph Meister, mordu par un chien enragé, se présente à Pasteur avec sa mère pour être soigné, le savant se dit qu’il est temps de tester le vaccin contre la rage sur un être humain. C’est un succès : l’enfant, vacciné à plusieurs reprises, ne développera jamais la maladie. La nouvelle se répand et le laboratoire de Pasteur à Paris est envahi de personnes qui veulent se vacciner.

Acte 6

C’est ainsi que pour soigner les malades, développer la recherche et former les scientifiques aux nouvelles méthodes naît l’Institut Pasteur, grâce à de multiples donations françaises et étrangères.
Le travail commencé par Pasteur et ses collaborateurs continue aujourd’hui dans le réseau mondial des centres de recherche de l’Institut Pasteur, fondé en 1887. En France nous avons deux Instituts Pasteur : à Paris et à Lille. Chacun de ces centres a institué un Musée.

Ici vous pouvez trouver mon article suite à ma visite au Musée Pasteur de Lille, en compagnie de ma collègue blogueuse Pascale du blog Le monde et nous

Ici je parle brièvement du Musée Pasteur de Paris, dans un article qui liste les lieux scientifiques visitables de Paris (liste non exhaustive) 

Cet article est paru dans le numéro 201 (février 2018) de Cosinus, le journal de mathématique et sciences pour jeunes, Editions Faton.

2 réflexions sur « Dans le laboratoire de Pasteur »

  1. mais oui c’est à la lecture de cet article que je viens de faire le lien de l’origine du mot pasteurisation. Merci Ludmilla, ce soir je dormirai moins bête!

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