Nix olympica

Voyageons en direction Mars en compagnie d’un livre à cheval entre science-fiction et vulgarisation scientifique

Nix Olympica est le premier roman de Nicolas Beck, paru en 2020 pour les éditions Lucca. Il s’agit d’un roman d’anticipation qui raconte un hypothétique premier voyage habité sur Mars en l’année 2038. La protagoniste principale est une jeune astronaute française géologue.

L’auteur

Comme sa protagoniste, Nicolas Beck est géologue de formation, mais aussi communicateur scientifique et Directeur de la Vie Universitaire et de la Culture de l’université de Lorraine. J’ai le plaisir de l’appeler collègue parce qu’on écrit pour le même journal depuis des années (le magazine de sciences pour jeunes Cosinus) et ça nous est arrivé de former ensemble des doctorants à la vulgarisation scientifique.

Le format du livre

C’est un livre volumineux qui peut faire peur au début, mais en réalité c’est un livre très agréable à lire même d’un point de vue “physique”. Des pages aérées, des dessins, des couleurs, des graphiques captivants, plein – mais vraiment plein ! – d’encadrés qui aident à comprendre l’histoire de plusieurs points de vue.

Le sujet

Il s’agit d’une aventure passionnante qui nous fait voyager vers la planète rouge avec une équipe de 5 astronautes, et je peux vous dire que pendant le voyage il arrive tellement de choses ! Si vous voulez avoir une idée de comment on peut aller, d’un point de vue technique, sur Mars, entre technologies avancées et difficultés techniques, ce livre est pour vous. Mais probablement vous vous êtes déjà demandés comment c’est, d’un point de vue humain, de faire face à un long voyage dans une boîte en métal qui se dirige vers l’inconnu. Les communications officielles des agences spatiales du monde entier contrôlent rigoureusement les informations qui arrivent au public, mais dans ce livre rien n’est censuré ! Vous pouvez suivre l’aventure de l’intérieur, grâce aussi au carnet de bord de la protagoniste. Je ne veux pas spoiler ultérieurement, mais sachez qu’il y a aussi les éléments d’un polar et une bonne dose de mystère .

Mon avis et mes curiosités

Ce livre m’a beaucoup étonnée. Pour commencer il n’est pas du tout comme je l’imaginais. Je pensais à un livre d’aventures où on parlait de prouesses technologiques, de personnages vaillants, de paysages extraordinaires. Il y a, bien sûr, tout ça, mais je dirais que le sujet principal est surtout l’aventure humaine des personnages, j’ai envie de dire de l’humanité entière. C’est un livre surprenant, aux fortes émotions, plein de coups de scène. Moi, d’habitude, je lis les romans le soir dans mon lit et parfois je me suis couchée très tard parce que je n’arrivait pas à décrocher ! Du coup, j’avais plein de questions à poser à Nicolas Beck. Je l’ai fait lors d’une interview live sur mon compte Instagram (elle est encore visible en replay ici abonnez-vous !). Ici, de suite, vous trouverez une presque-retranscription de l’interview. Bonne lecture !

Comment as-tu eu l’idée de ce livre, pourquoi as-tu ressenti le besoin de parler de ce sujet ?

Je suis tombé amoureux des sciences de la Terre et de l’univers quand j’étais petit, ce qui m’a amené à me lancer dans des collections de fossiles et minéraux, et à parcourir les volcans. L’histoire de notre planète et par extension, des autres planètes du système solaire, permettent à mes yeux de prendre du recul tout en questionnant notre rapport à la nature et en prenant conscience de la Terre et sa fragilité.

Le voyage dans l’espace est un sujet d’actualité brûlante ! Tandis que les missions au sol se multiplient, les agences spatiales préparent petit à petit le premier vol habité, qui aura sans doute lieu au cours du 21ème siècle. Alors qu’on pensait que Mars était une planète rocheuse sans intérêt, après les premiers survols par la sonde Mariner dans les années 60, on a complètement redécouvert la planète ces derniers temps et elle est fascinante ! C’est pour ça que j’ai choisi d’écrire sur ce sujet passionnant, qui interpelle, qui fait rêver.

A quel public en particulier tu t’adresses avec ce livre ?

Le livre est catalogué Young adult, donc jeune public à partir de 12 ans. Il est largement accessible, notamment par son format journal de bord : l’astronaute française qui raconte son voyage, qui partage ses moments de réussite, de doute, d’émotion, nous emmène dans son voyage. Le journal est également enrichi avec des coupures de presse, des communiqués de la NASA, des retranscriptions de l’intelligence artificielle du vaisseau, ce qui donne un rythme dynamique à la lecture. En tant qu’auteur, cela m’a permis d’apporter plusieurs points de vue à la mission et d’apporter des tas d’informations scientifiques.

Parmi les retours que j’ai eus, on m’a aussi indiqué que ce livre pouvait permettre de renouer avec la lecture, car le format est facile, accessible, permet de lire en plusieurs fois, de se projeter dans le voyage vers Mars tout en étant dans le registre de la science-fiction réaliste, à portée de main.

Dans ce livre je vois aussi de la vulgarisation scientifique, je vois qu’il y a un grand travail de préparation derrière. Est-ce que tout ce que tu racontes est possible techniquement, qu’est-ce qu’il y a de vraisemblable et d’impossible ?

J’ai voulu me lancer dans cette écriture aussi pour faire de ce livre un objet de vulgarisation scientifique. On peut faire de la science – parler de science – à travers les livres, et je pense que c’est un média intéressant pour des publics plus éloignés des sciences. La rencontre avec Lucca Editions a donc été une belle opportunité, puisque la ligne éditoriale de cette maison créée en 2018 par Sandrine Harbonnier est calée sur cet axe.

Pour écrire, je me suis en effet appuyé sur des données scientifiques réelles : des études de la NASA, des recherches sur la psychologie des vols spatiaux, sur les effets physiques sur le corps humain. Et bien sûr, sur la géologie martienne : l’histoire de la planète, ce qu’on y trouve, les volcans, etc. J’ai rencontré des chercheurs, spécialistes du sujet, pour les interroger, afin de recueillir des informations qui sont parsemées dans le livre sous différentes formes.

Le roman est donc classé dans l’anticipation scientifique dans le sens où c’est réellement ce qui pourrait se passer, jusqu’aux dates du voyage qui font partie d’un scénario étudié par l’agence spatiale américaine. J’ai uniquement pris quelques libertés avec mes personnages et quelques technologies futuristes placées ça et là dans le livre.

Comment ça a été de se mettre dans la peau d’une femme? De qui tu t’es inspiré?

La place des femmes dans les sciences est un vrai sujet, auquel je sais que tu es sensible, Annalisa ! Et l’astronomie et conquête spatiale n’y échappent pas : rappelez-vous celles qu’on appelle les femmes de l’ombre, qui ont œuvré presque dans le secret, sans qui on ne serait pas allés sur la Lune… Il existe encore trop peu d’astronautes femmes, dont une seule française partie dans l’espace, Claudie Haigneré. J’ai d’ailleurs eu l’occasion d’échanger avec elle au moment de l’écriture du livre, et je sais qu’elle se bat pour les mêmes choses : renforcer la place des filles dans les études puis les carrières scientifiques. Donc cela m’a paru une évidence que le premier être humain à mettre le pied sur Mars pouvait être une femme ! Concrètement, la mixité des équipages est aussi une vraie question que se posent les agences spatiales. Cela implique des réflexions de fond sur le choix de l’équipage, la présence ou non de couples pour des voyages longs, les rapports sexuels, etc. Mais globalement la présence d’un équipage mixte garantit un certain équilibre.

Quelle est la partie dont tu es le plus fier ? Quelle est la partie que tu aurais voulu approfondir ?

La partie qui fait rêver, c’est un passage que j’aime particulièrement, c’est quand l’équipage s’éloigne de la Terre, le point de non-retour. J’ai en tête cette image de la Terre, dans son ensemble, planète où est née la vie, où est née notre espèce, et que cinq êtres humains quittent pour aller – pour la première fois – à une distance si lointaine. Cela fait relativiser et comprendre la fragilité de nos corps, de l’être humain en général, mais aussi de la vie en général.
Les plus curieux iront lire page 69 : «En contemplant ce décor somptueux digne d’une vue d’artiste, j’ai aussi pris en pleine figure un message de détresse, comme un appel de la planète à ses habitants. Un énième signal pour alerter des hommes qui persistent à couler leur propre navire, au beau milieu d’un océan. »

Quelle est, à ton avis, la différence principale entre l’écriture en vulgarisation scientifique et l’écriture en littérature?

Je pense qu’il y a beaucoup plus de points communs que l’on ne croit ! D’abord, le travail qui consiste à faire preuve d’imagination : établir des liens, des connexions, imaginer un scénario, construire, défaire, reconstruire. Je pense que ceci est valable tout autant pour un travail de vulgarisateur ou vulgarisatrice scientifique que d’écrivain ou écrivaine. Ensuite, Le deuxième point commun serait la façon de savoir raconter : pour écrire, on jongle avec les mots pour utiliser leur puissance, leur force, la subtilité d’un qualificatif, la poésie qui rime quand on assemble des mots, la ponctuation… En science comme en littérature, la transmission est indispensable ! Les scientifiques publient, transmettent à leurs étudiants, communiquent lors de colloques, mais aussi au grand public. Savoir raconter est donc la clé de la progression des connaissances.

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